Vient voir son professeur

Helena regarda alors le professeur Lizbeth confuse. Elle ne s'était même pas rendue compte qu'elle n'avait pas salué les professeur avant de sortir.

Veuillez m'excuser professeur je ne souhaitait pas être impolie. Je n'ai pas fait attention je suis désolée je pensais à trop de chose à la fois.

Helena s'inclina legèrement vers le professeur en signe de pardon.

*Bon sang fait attention tu vas t'attirer des ennuis! Il faut arrêtter de penser à ces criminels pour l'instant. Je dois finir de rattraper les cours je lui demanderais plus tard pour le devoir de botanique c'est pas grave.*

Elizabeth considéra l'élève un instant sans grande indulgence puis lui laissa le chemin libre.

-C'est bon mademoiselle Ramirez. Vous pouvez y aller pour cette fois-ci. Mais à l'avenir, surveillez davantage votre comportement.

Elle retourna dans le bureau de Tom.

Merci professeur. Aurevoir.

*J'ai eu chaud*

Helena partit alors dans les longs couloirs.

Elizabeth s'installa à nouveau dans le bureau de Tom et attendit qu'il soit à son tour assis. Elle le regarda tranquillement avant de prendre la parole.

-Il semble que mademoiselle Ramirez ait encore tout gardé de ses réflexes regrettables. Cela faisait-il longtemps qu'elle était dans votre bureau professeur Joad ? Elle n'est évidemment pas à jour de ses devoirs et il faut qu'elle apprenne à utiliser son temps autrement qu'en venant questionner son enseignant.

Tom répondit, un peu hésitant comme à chaque fois que Lizbeth le questionnait:
-Oh, non... elle a dû rester cinq ou dix minutes... pas beaucoup plus... Elle venait me voir au sujet du rattrapage des cours qu'elle a manqués quand elle était à Sainte-Mangouste... (Un doute le saisit soudain) J'espère qu'elle essaie de rattraper tous ses cours, pas seulement ceux de botanique?
Il avait posé la question, bien qu'il fût à peu près certain de la réponse de Lizbeth: de toute évidence, Helena ne se préoccupait que de la botanique, qui était pourtant une matière secondaire.

Elizabeth répondit à la question de Tom avec un air légèrement exaspéré sur le visage.

-Je ne préjugerai pas de ce qu'il en est pour les autres matières, mais je vais m'empresser d'aller m'en informer. En tout cas cette demoiselle ne s'est absolument pas inquiété auprès de moi de la manière de reprendre le cours d'occlumancie qu'elle a manqué. Et en ce qui concerne les devoirs, il me semble qu'elle n'est pas à jour en histoire de la magie noire. Mais j'aurai de toute manière un entretien avec elle à ce sujet.

Elle s'adossa davantage à sa chaise et reprit.

-Où en est-elle de sa décision selon vous ? Il serait temps d'en informer un minimum nos collègues, ne serait-ce que pour leur demander une surveillance toute particulière de cette élève.

-Oui, c'est bien ce que je pensais, commenta Tom à mi-voix. Elle ne s'est intéressée qu'à la botanique.
Il réfléchit un instant à la question de Lizbeth et répondit, en toute franchise:
-Je ne sais pas, Professeur Selew. Elle dit et répète qu'elle a changé, mais son comportement nous prouve le contraire, vous ne croyez pas? Je lui ai dit que nous ne nous contenterions pas de paroles, mais je ne suis pas sûr d'avoir été bien compris...

Elizabeth acquiesca.

-C'est exactement ce qu'il me semble professeur Joad. Je crois aussi qu'elle attend beaucoup trop que l'univers change autour d'elle parce qu'elle prononce quelques paroles qu'elle croit à tort être des Sesam. Il nous faut encadrer son comportement de manière plus stricte. D'une manière ou d'une autre, elle comprendra alors ce à quoi elle prétend s'engager. Elle a trop tendance à demander au lieu de donner. Cela ne convient pas et il faut qu'elle change de manières. Je compte sur vous pour le lui rappeler aussi professeur Joad.

-Sur moi? répéta Tom un peu effrayé par l'ampleur de la tâche. Il prit une grande inspiration et expliqua:
-Je crains que cette élève ne s'attache trop à moi, Professeur. Elle n'a cherché à rattraper qu'un seul cours: le mien. Elle est venue me parler, à moi, de la mort de ses parents... Je crains qu'elle ne m'accorde trop d'importance. Imaginez qu'elle n'ait la volonté de s'intéresser à la magie noire que pour se rapprocher de moi, et pas pour progresser et servir le Seigneur des ténèbres? Ses priorités m'ont l'air d'être illogiques.

Elizabeth adressa un léger sourire de satisfaction à son collègue et la lueur étrange passa dans ses yeux.

-En effet professeur Joad, c'est bien ce que je crains aussi. C'est pourquoi l'arrêt de toute cette tendance ne peut venir que de vous. Ce n'est que de vous qu'elle pourra entendre réellement qu'un tel "attachement" est vain et insensé, et ce n'est que venant de vous qu'elle prendra conscience des limites nécessaires à une relation, fut-elle privilégiée, entre un enseignant et son élève. J'aurai beau quant à moi lui dire ce que je voudrai, si elle sent que de votre côté les choses sont flottantes et que vous lui laissez une quelconque marge de manoeuvre, mes propos ne serviront à rien. Elle continuera à nourrir un espoir. Je conçois que cela vous semble difficile, peut-être périlleux, mais c'est aussi absolument nécessaire.

Tom regardait le tapis. Il savait que toutes ses pensées étaient perçues par Lizbeth, et ça le mettait mal à l'aise. Il se décida à regarder Lizbeth pour dire:
-Je vais mettre les choses au clair avec Miss Ramirez, Professeur. La prochaine fois que je la verrai, je lui ferai comprendre explicitement qu'elle ne doit pas s'attacher à moi... Et... pour en revenir à votre question au sujet de nos collègues... Miss Ramirez a fait part de ses nouvelles intentions au Professeur Loncourt qui n'a pas eu l'air convaincue. Je pense qu'il faudrait exposer la situation à nos collègues, afin que chacun, connaissant les hautes ambitions de cette élève, puisse lui faire sentir les exigences qui pèsent désormais sur elle.
Sans l'avouer, Tom espérait qu'ainsi, il ne serait plus seul aux prises avec Helena... Il devait reconnaître que ce rôle de mentor qu'il avait accepté lui semblait de plus en plus lourd.

-La réaction du professeur Loncourt ne m'étonne pas professeur Joad. Elle manifeste même beaucoup de prudence et de bon sens. Autant vous dire qu'elle ne sera pas la seule à réagir ainsi. Mais oui, je vais tenir au courant les professeurs, de manière informelle et individuelle. Nous avons en effet malheureusement déjà eu le cas d'une élève qui affichait des projets ambitieux qui se sont avérés parfaitement mensongers. Il est donc inutile de reproduire ce cas de figure.

Elle le regarda un instant, percevant son malaise et ses doutes.

-C'est une lourde reponsabilité professeur Joad que de suivre et de guider de manière aussi particulière une élève. Ne vous étonnez pas que cela soit ardu. Mais si nous devions baisser les bras chaque fois qu'une difficulté, si grande soit elle, s'élève, nous n'irions pas bien loin n'est-ce pas ? Si quelque chose vous semblait dériver ou échapper à votre contrôle, vous savez que vous pourriez venir me voir et en parler, et que cela serait préférable au fait de taire les choses et de les laisser s'envenimer ?

Tom se sentit bien seul soudain. Lizbeth le laissait seul face à son problème. Il répondit d'une voix faible:
-Bien sûr, je viendrai vous voir au premier problème, Professeur Selew. Je n'ai pas l'intention, si je ne m'en sors pas, de m'enferrer dans l'erreur. J'essaierai de me montrer à la hauteur de cette tâche... En tout cas, je vous remercie de votre aide...
Tom avait plutôt envie de dire : "c'est ça que vous appeler m'aider? mettre tout le monde au courant et me laisser me débrouiller!" mais il n'osait pas... Il savait cependant que Lizbeth percevait tout ce qu'il pensait, et son embarras s'en trouvait augmenté.

Lizbeth sentit une vague de malaise chez son intelocuteur. Elle plissa les yeux et scruta son collègue.

-Professeur Joad, je n'active pas en permanence le sortilège de légilimancie, et si je perçois spontanément l'état de mes interlocuteurs, je n'ai pas pour habitude d'exercer sur mes collègues une intrusion invasive, à moins qu'ils ne me donnent une bonne raison de le faire et je ne souhaite pas que ce soit votre cas. Par conséquent, si vous désirez me faire comprendre quelque chose, le plus simple est encore de me le dire.

Elle se tut un instant avant de reprendre dans une attitude moins soupçonneuse.

-Pour clore la question concernant mademoiselle Ramirez, je la convoquerai une première fois pour mettre les choses au clair et je la verrai ensuite très régulièrement. Elle finira pas comprendre qu'aucune relation d'exclusivité ne sera autorisée.

A cette annonce, Tom se sentit un peu mieux. Lizbeth allait vraiment l'aider... Après tout, c'était la directrice de maison de l'élève... Il essaya de se raisonner. Il n'y avait pas de raison pour qu'on le laisse seul dans le pétrin... Il répondit, d'une voix un peu plus ferme:
-Tout va bien, Professeur Selew. Si j'ai un doute ou un problème, je n'hésiterai pas à vous en faire part. Merci pour votre aide.

-De rien professeur Joad, c'est mon rôle.

Elle s'apprêta à quitter le bureau, puis se ravisa et posa une dernière question.

-Puisque nous sommes ensemble, et que nos emplois du temps respectifs ne nous laissent que rarement ce genre d'occasion, souhaitiez vous me parler de quelque chose d'autre ?

Tom réfléchit rapidement... et trouva un sujet dont il voulait parler à Lizbeth sans oser la déranger pour si peu...
-Puisque vous me le proposez, Professeur... Je voulais vous informer que Miss Angélique Black avait eu un comportement épouvantable à mon cours. Elle parlait avec Léa Black, et lorsque j'ai voulu les séparer, elle s'est exclamée que jusque-là, je n'avais jamais eu à me plaindre d'elle, et que donc, j'étais mal inspiré de la réprimander... Et ensuite... J'ai demandé aux élèves de tester des poisons sur des souris, et elle s'est mise à pleurer sur ces bestioles. Je pensais que vous voudriez être informée de cette attitude...

Une lueur mauvaie passa dans le regard d'Elizabeth avant de se transformer en un sourire sardonique sur ses lèvres.

-En effet, vous faites bien de m'en informer. J'avais averti ces demoiselles de ne pas me donner l'occasion de mettre un terme à leurs touchantes retrouvailles, elles viennent donc de prouver qu'elles ne savent pas profiter des avertissements qu'on leur donne. Je me charge de cela, merci professeur Joad.

Cette fois-ci elle se leva.

-Bien. Je ne vais pas abuser davantage de votre temps professeur Joad. Je suis heureuse que nous ayons eu cet entretien. Au revoir et à bientôt en salle des professeurs, sans doute.

Tom se leva précipitamment pour aller dire à Lizbeth en lui tenant la porte:
-Autre chose, Professeur... J'ai patrouillé hier soir dans l'Allée des Embrumes avec le Professeur Loncourt... et nous n'avons rencontré qu'une seule personne : Helena Ramirez. Nous avons passé plus de quatre heures dans cette rue sans voir personne, pas même un bar ouvert... Ce calme nous a paru inquiétant.

-Hélena Ramirez ? Encore ! Décidément...

Elizabeth retint un soupir d'exaspération mais n'ajouta rien sur ce point.

-Merci à vous et au professeur Loncourt. Je vais voir si ces informations de calme en effet étrange se renouvellent, auquel cas, nous chercherons ce qui se trame.

Elle fit un signe de tête à son collègue et sortit dans le couloir pour rejoindre son propre bureau.